Kloar Micro-Musée n°9 : Raphaël Lewisohn



9ième édition du Kloar Micro-Musée à la médiathèque Robert Badinter : la dernière œuvre entrée dans la collection municipale de la ville de Clohars-Carnoët, la peinture "La [bergère] sur la dune en Bretagne" de Raphaël Lewisohn.

Raphaël LEWISOHN (Hambourg, 1863 – Paris, 1923)

Peintre d’origine allemande, naturalisé français.

LA [BERGÈRE] SUR LA DUNE EN BRETAGNE

Vers 1907

Huile sur panneau de bois, signature en bas à gauche

H. 61 ; L. 50 cm

Au premier plan, une femme en coiffe blanche et tablier bleu est assise dans les dunes, un long bâton à la main. Derrière elle, trois bestiaux à la robe brune pâturent librement. Le toit d’une maison émerge en arrière-plan.

Autrefois, les troupeaux pacageaient librement dans la lande et sur les dunes riveraines de la mer. Les herbes, les ajoncs épineux, les genêts et les bruyères remplissaient un rôle alimentaire. L’un des motifs de prédilection des artistes venus nombreux au Pouldu à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle était la représentation des vaches au sommet des hautes dunes situées à l’arrière de la plage de Bellangenêt. La chaumière d’Héléna, isolée au fond de cette anse sablonneuse, au village de Kerluron, apparaissaient alors dans certaines compositions.    

En 1907, Raphaël Lewisohn présente au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts, où depuis des années il est membre associé, quatre tableaux : Chercheurs de sable (Le Pouldu, Bretagne), Pâturage dans les dunes (Le Pouldu, soir), La mare de Kerluran [sic] (demi-soleil, Le Pouldu) et Les dunes du Pouldu (Bretagne).

Raphaël Lewisohn est né à Hambourg, en 1863, de parents industriels. Dès son jeune âge, il manifesta un goût prononcé pour les Beaux-arts, et, malgré la carrière très lucrative qui l’attendait dans l’industrie où sa famille occupe une haute situation à New-York, il quitta tout pour suivre sa vocation et vint à Paris en 1884. Son premier souci fut de se faire naturaliser et il accomplit son service militaire à Alençon, puis se maria à une Française. Lewisohn exposa la première fois aux Artistes Français en 1889.

"La peinture de Lewisohn est essentiellement personnelle et échappe à toute comparaison. Sa facture ne rappelle aucun Maître et l’on n’y sent l’influence d’aucune école moderne, parce que le peintre n’eut d’autre professeur que la Nature. C’est devant elle qu’il est allé chercher l’inspiration qui grondait en son âme, telle une source souterraine dont il écoutait anxieusement les musiques assourdies.

Ce souci constant de puiser aux sources de la Nature, cette communion perpétuelle de l’artiste avec les choses lui ont donné le goût du coloris à un degré tel qu’il absorbe la ligne, au point de la faire disparaître sous le jeu des taches colorées.

C’est à cette limite de l’impression qu’il devient le continuateur des grands impressionnistes dont il a suivi l’exemple. Comme eux, il s’est évadé des formules, des routines, des visions fausses et des couleurs de convention. Par ce geste libérateur il se relie à la tradition de tous les artistes originaux pour qui la nature fut la seule et sublime Inspiratrice.

Observateur aigu et précis, Lewisohn ne regarde pas au-delà de la vision extérieure, ne pénètre pas la psychologie de son sujet, ne la cherche pas et la trouve cependant par la justesse de sa vision.

Lewisohn voit les choses et les êtres avec une acuité de perception très rare chez les artistes modernes. Réaliste, telle est la note dominante du talent de Lewisohn, mais son réalisme n’est ni une étiquette d’école, encore moins un thème à sociologie ou satire sociale.

Il est réaliste à la façon des Hollandais, ne tire nul effet ironique ou dramatique des contrastes dont il pourrait user. Il voit la réalité telle qu’elle est, sans fioriture ni grossissement, avec ses laideurs familières et sa poésie incomplète et fugitive.

Ce réalisme lui fait chérir les humbles, les êtres astreints aux tâches fatigantes qui développent les muscles, font jaillir les attitudes, mettent en valeur les formes."

 Extraits de L’œuvre de Raphaël Lewisohn de J.-C. Holl, 1906, Éditions des Cahiers d’Art (Paris-XVI)